Terminé Exposition Du 26/02 au 28/04/2016 de 09:00 à 20:00
Action culturelle Fonds patrimoniaux
BIS Bibliothèque de la Sorbonne, 17 Rue de la Sorbonne 75005 Paris
Tout public
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Jean-Joseph Weerts, peintre de la Fête du Lendit

Jean-Joseph Weerts, peintre de la Fête du Lendit Bibliothèque Interuniversitaire de la Sorbonne

La Bibliothèque de la Sorbonne a pu acquérir, il y a quelques années, seize esquisses préparatoires de la Fête du Lendit, témoignant des talents de dessinateur de leur auteur Jean-Joseph Weerts (1846-1927). La présentation de treize d’entre elles est l’occasion de replacer cette œuvre dans l’immense chantier que constitua, au tournant du XXe siècle, la reconstruction de la Sorbonne tout en évoquant la longue carrière de Jean-Joseph Weerts qui, avant d’être éclipsé par la postérité de ses contemporains impressionnistes, fut en son temps un peintre réputé et honoré.

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Jean-Joseph Weerts, peintre de la Fête du Lendit

Jean-Joseph Weerts, peintre de la Fête du Lendit Bibliothèque Interuniversitaire de la Sorbonne

Combien, parmi les milliers d’étudiants qui fréquentent chaque année la Sorbonne, se sont attardés devant les peintures décorant la partie extérieure de la galerie Sorbon ? Combien se sont arrêtés pour contempler cette Fête du Lendit qui en orne les murs, à l’image de l’étudiante Françoise Maieul, personnage des Hommes de bonne volonté de Jules Romains, qui se laisse aller à l’observer à chaque rendez-vous donné sous les arcades de la cour d’honneur ? Combien d’autres sont passés sans la voir, en dépit de ses couleurs et de ses dimensions imposantes, fondue qu’elle était dans le cadre familier de leurs chères études ? Qui, parmi eux, se souvient du nom de celui qui en fut le créateur : Jean-Joseph Weerts (1846-1927) ?

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ean-Joseph Weerts, peintre de la Fête du Lendit

ean-Joseph Weerts, peintre de la Fête du Lendit Bibliothèque Interuniversitaire de la Sorbonne

Jean-Joseph Weerts est le fils aîné d’un inventeur-mécanicien belge venu s’établir à Roubaix dans la première moitié du XIXe siècle pour travailler dans l’industrie textile, alors en plein essor. Sa vocation artistique est très tôt encouragée par son père, ancien élève de l’Académie d’Anvers. Premier artiste pensionné de la ville de Roubaix, il intègre en 1867 l’École des beaux-arts de Paris où il est l’élève d’Isidore Pils et d’Alexandre Cabanel. A partir de 1869, il expose régulièrement au Salon, s’illustrant aussi bien dans les genres religieux et décoratifs que dans le portrait et la peinture d’histoire. C’est le début d’une parfaite carrière académique qui lui vaudra de siéger au Conseil supérieur des Beaux-arts, de recevoir les insignes de commandeur de la Légion d’honneur et de voir nombre de ses tableaux, acquis par l’État, rejoindre les cimaises des musées français. Abondamment reproduite dans les manuels scolaires de la IIIe République, sa Mort de Joseph Bara est caractéristique d’une certaine prédilection pour les épisodes de la Révolution française et les scènes militaires et patriotiques. Il est l’auteur prolifique d’une œuvre riche de plus de 700 créations parmi lesquelles figurent d’innombrables portraits fixant les traits des célébrités du temps et loués pour leur expressivité. Il participe également à la décoration de plusieurs bâtiments publics, que ce soit à Paris (salle des fêtes de l’Hôtel de ville, Hôtel de la monnaie) ou en province (hôtels de ville de Roubaix et Limoges, grand amphithéâtre de l’université de Lyon). Sa reconnaissance envers la ville de Roubaix qui l’a soutenu à ses débuts le conduit à y fonder un prix de peinture ainsi qu’un musée dédié à son œuvre, inauguré de son vivant (1924).

Il n’est donc guère étonnant de retrouver le nom de Weerts parmi les peintres de la nouvelle Sorbonne. Par leur nombre et leurs dimensions, les peintures murales de la Sorbonne constituent l’un des plus vastes ensembles décoratifs réalisés dans le dernier tiers du XIXe siècle, après celui de l’Hôtel de ville de Paris. Les commandes s’échelonnent entre 1886 et le début du XXe siècle, selon plusieurs tranches correspondant aux différentes étapes du projet architectural d’Henri-Paul Nénot, commencé en 1883. Accédant durablement au pouvoir, les républicains des années 1880 ne sont pas avares en crédits. Cette générosité traduit le double souci d’inscrire dans la pierre leur ambitieux programme de réformes scolaires en même temps que de promouvoir le prestige culturel de la France, à travers une politique artistique résolument interventionniste. Au-delà de la question politique, elle répond au goût contemporain des intérieurs polychromes et des effets pittoresques conçus pour contrebalancer la sévérité des formes architecturale. C’est dans ce contexte que s’inscrit la réalisation de la Fête du Lendit.

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Jean-Joseph Weerts, peintre de la Fête du Lendit

Jean-Joseph Weerts, peintre de la Fête du Lendit Bibliothèque Interuniversitaire de la Sorbonne

La Fête du Lendit illustre un épisode fameux de la vie universitaire parisienne au Moyen-Age, lié à la foire dionysienne du Lendit (du latin Indictum, désignant un lieu d’assemblée), qui demeura longtemps un des grands rendez-vous du commerce occidental. Elle se tenait chaque année du 11 juin, jour de la Saint Barnabé, au 24 juin, jour de la Saint Jean, dans la plaine Saint-Denis, le long de la route menant à Paris. On y vendait notamment le parchemin utilisé par la communauté universitaire. Le 12 juin, toutes les écoles parisiennes avaient congé et les représentants de l’institution universitaire - recteur, doyens des facultés, procureurs des nations, suppôts... -, suivis de la foule des étudiants, cheminaient en procession solennelle des hauteurs de la montagne Sainte-Geneviève jusqu’à Saint-Denis après avoir emprunté la rue Saint-Jacques. Arrivé sur le champ de foire, le recteur donnait la bénédiction puis visitait les boutiques des parcheminiers afin de prélever, en vertu d’un usage ancien, le parchemin nécessaire à l’université pendant l’année à venir.

 

L’œuvre de Jean-Joseph Weerts se présente sous la forme de deux immenses toiles marouflées, de dimensions équivalentes (3,10 x 8,60 m), consacrées pour l’une à la Foire aux parchemins (à gauche), pour l’autre au Cortège des étudiants (à droite).

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Jean-Joseph Weerts, peintre de la Fête du Lendit

Jean-Joseph Weerts, peintre de la Fête du Lendit Bibliothèque Interuniversitaire de la Sorbonne

Commandée en 1894 par l’administration des Beaux-arts, elle ne sera achevée et installée sous les arcades de la cour d’honneur que dix ans plus tard, à l’issue d’un long travail de préparation et d’exécution imposé par les dimensions de la composition autant que par les nécessités de la reconstitution historique : en bon peintre d’histoire, Weerts s’est appliqué à représenter les personnages dans les costumes et les attitudes de leur époque en s’appuyant sur une documentation érudite. Le prix final de l’œuvre fut très élevé (40 000 francs). Dans le domaine de la peinture décorative, elle figure au rang des commandes les plus onéreuses passées dans le cadre du chantier de la nouvelle Sorbonne, avec le Bois sacré de Pierre Puvis de Chavannes, réalisé pour le grand amphithéâtre et les toiles de François Flameng et Théobald Chartran, décorant l’escalier d’honneur. Composée beaucoup plus tardivement (vers 1920), une seule autre peinture de Weerts prendra place sur les murs de la Sorbonne : Pour l’humanité, pour la patrie, pour la France, soldat de Dieu (3,85 x 2,40 m), installée dans la chapelle.

 

Par son style, par son thème autant que par son emplacement, la Fête du Lendit est une œuvre assez représentative du programme iconographique développé au sein de la nouvelle Sorbonne.

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Jean-Joseph Weerts, peintre de la Fête du Lendit

Jean-Joseph Weerts, peintre de la Fête du Lendit Bibliothèque Interuniversitaire de la Sorbonne

Par son style : si l’on excepte la manière de Pierre Puvis de Chavannes dont le symbolisme épuré et les tonalités douces contribuent dans les années 1880 à un incontestable renouvellement de la peinture murale et quelques audaces plus tardives dues notamment à Hélène Dufau, la plupart des artistes chargés de décorer la Sorbonne de Nénot se sont montrés peu sensibles à l’évolution des arts en dehors de la peinture dite officielle : aux côtés de François Flameng, de Théobald Chartran ou encore de Jean-Paul Laurens dont les peintures décorent la salle de lecture de la bibliothèque, Weerts appartient résolument à cette famille d’artistes garants du savoir-faire académique et respectueux de la tradition et des enseignements reçus à l’École des Beaux-arts.

Par son thème : portrait collectif de l’ancienne université de Paris, représentée à l’époque de son épanouissement et de son plus grand rayonnement international, l’œuvre de Weerts est porteuse d’une vision majestueuse et idéalisée de l’université médiévale, forte de ses privilèges et riche d’hommes et de traditions ; le visiteur est invité à mettre en regard de cette grandeur passée la renaissance de l’institution universitaire au tournant du XXe siècle.

Par son emplacement, enfin, qui contribue à faire de la cour d’honneur de la Sorbonne un lieu chargé de temporalités multiples : évocation du glorieux passé de l’université, à l’époque médiévale, la Fête du Lendit est installée sous les arcades de la partie extérieure de la galerie Sorbon, aménagée dans les corps de bâtiments nouvellement construits par Nénot, et fait face à la chapelle érigée au 17e siècle par Jacques Lemercier, seul vestige de la Sorbonne de Richelieu.

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Jean-Joseph Weerts, peintre de la Fête du Lendit

Jean-Joseph Weerts, peintre de la Fête du Lendit Bibliothèque Interuniversitaire de la Sorbonne

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Jean-Joseph Weerts, peintre de la Fête du Lendit

Jean-Joseph Weerts, peintre de la Fête du Lendit Bibliothèque Interuniversitaire de la Sorbonne

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Jean-Joseph Weerts, peintre de la Fête du Lendit

Jean-Joseph Weerts, peintre de la Fête du Lendit Bibliothèque Interuniversitaire de la Sorbonne

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Jean-Joseph Weerts, peintre de la Fête du Lendit

Jean-Joseph Weerts, peintre de la Fête du Lendit Bibliothèque Interuniversitaire de la Sorbonne

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Jean-Joseph Weerts, peintre de la Fête du Lendit

Jean-Joseph Weerts, peintre de la Fête du Lendit Bibliothèque Interuniversitaire de la Sorbonne